Avec Sylvie Cohen (Limoges 2012) |
Avec Jean-François Fournel |
Avec ma pomme |
Serge Vacher est né en 1957 à Larue, au pied du plateau des Monédières, entre Haute-Vienne, Corrèze et Creuse.
Avant de devenir son éditeur, on a pas mal bourlingué ensemble, souvent dans le Limousin, avec l’ami de Tulle Pierre Fossard (disparu en 1998), parfois un peu plus loin. Je me souviens d’un voyage épique en Pologne, à Wroclaw, où nous causâmes polar devant une armada de bibliothécaires en compagnie de romanciers polonais passionnants, filmés par la télé polonaise, avant d'avoir une longue conversation un tantinet avinée sur notre "névrose sociale", sous les yeux ébaubis de Marc Brudieux, qui nous avait invités.
La première fois que j’ai vu Serge, c’était en 1993, aux 24 heures du Livre du Mans, au pot de l’association 813. Il avait fait le déplacement de Limoges. Entre deux verres de vin, il me lança : "J’ai écrit deux polars, ça se passe dans le Limousin, c'est sans prétention mais voilà… Si ça te plaît, ils sont à toi. Puisqu'il paraît que tu es éditeur." (Je venais tout juste de monter les éditions Canaille pour publier mes propres romans, c’était la première fois que je mettais les pieds dans un salon du livre, et j'ignorais complètement si je continuerais l'aventure… Je me suis dit "rude métier!") Je lui ai dit : "Serge Vacher, c'est ton vrai nom ou tu as pris un pseudo pour faire plus "terroir"?" Il a rigolé. (Serge riait beaucoup, c'était un champion du rire communicatif.) Et je suis rentré avec ses manuscrits sous le bras…
Je ne me souviens plus du titre des bouquins. Je me souviens seulement que ça sonnait juste, mais que le coté "gaudriole" écrasait un peu l'intrigue. Bref. Bien qu'étant moi-même un fils de paysan rompu au "milieu", je n'étais pas tout à fait convaincu… Il fallait dégraisser, nom de Dieu!
Ensuite, ma foi, l'eau a coulé sous les ponts, le vin dans les verres. Serge m'a envoyé d'autres manuscrits, que j'ai également refusés. Bien des auteurs se seraient vexés. Pas Serge, qui continua à m'abreuver de ces délicieuses histoires, en me disant : "tes conseils sont précieux, je m'en fous que tu ne les publies pas". Jusqu'à ce que je le publie, longtemps après, chez Après la Lune.
Je ne me souviens plus du titre des bouquins. Je me souviens seulement que ça sonnait juste, mais que le coté "gaudriole" écrasait un peu l'intrigue. Bref. Bien qu'étant moi-même un fils de paysan rompu au "milieu", je n'étais pas tout à fait convaincu… Il fallait dégraisser, nom de Dieu!
Ensuite, ma foi, l'eau a coulé sous les ponts, le vin dans les verres. Serge m'a envoyé d'autres manuscrits, que j'ai également refusés. Bien des auteurs se seraient vexés. Pas Serge, qui continua à m'abreuver de ces délicieuses histoires, en me disant : "tes conseils sont précieux, je m'en fous que tu ne les publies pas". Jusqu'à ce que je le publie, longtemps après, chez Après la Lune.
Avec Lo Cro do diable, Le ranch of Léon, Le blues de l'équarrisseur, il avait gagné une "force narrative", une empathie pour ses personnages qui leur donnait une épaisseur et une vraie humanité. Bref, il avait trouvé le ton juste pour raconter la vie et la mort des petites gens du Limousin. Les lecteurs ne s'y étaient d'ailleurs pas trompés, qui attendaient avec impatience "le prochain Vacher". Avant cela, il avait publié aux éditions Nykta un court et très joli roman, Les Coutures. Un cinquième titre, Le bâton de Bébé, était prévu chez Après la Lune en 2014, un sixième chez Geste éditions, Corvée de bois.
Entretemps, Serge, qui en plus d'être un excellent buveur et un ami fidèle, était un excellent connaisseur du polar, avait fondé l'association "La Vache qui lit", qui publiait le fanzine du même nom (136 numéros parus), semant la bonne parole dans les campagnes limousines qu'il connaissait si bien. Sa dernière initiative, le Salon "Polar et Vin", créé en 2012 à Limoges avec Joël Nivard, les joyeux drilles de l'association "les Picrates", la cave L’Hydropathe et David Bélair de la librairie Pages et Plumes, rencontra un franc succès. (Un écrivain, un vigneron, ça ne s'était encore jamais fait…).
Serge venait juste de prendre sa retraite d’instituteur, "avec quelques années d‘avance", me disait-il au téléphone en juin, histoire d’en profiter, parce que "on ne sait jamais ce qui peut arriver…" Le "on ne sait jamais" est arrivé. Serge vient de mourir le 17 juillet d’un AVC en Espagne, où il était en vacances avec sa compagne Nadine. Il avait 55 ans.