Je partage aujourd’hui ce texte glané sur la page Facebook d'un infirmier confiné aux urgences, je ne sais où en CofinFrance, et qui dit tout ce qu’il y a à dire (et à savoir) sur le sujet.
Salut, ça c'est moi, Pépouze, entre deux cafés, je suis infirmier aux urgences. Je pose avec ce graphique que vous avez probablement tous vu. Celui de l'évolution de l'épidémie en fonction d'un confinement ou pas, et cette ligne horizontale indiquant notre capacité de lit maximale en France. Regardez bien cette ligne surlignée, on en reparle à la fin.
Cela fait maintenant plus de dix ans que je trimbale mes baskets auprès de malades. Ce qu'on vit depuis deux mois est particulier mais ça fait dix ans que je vis des journées de dingue, parfois apocalyptiques. Dix ans que je vois des patients qu'on ne peut pas soigner correctement par manque de moyens : pas assez de personnel, pas assez de places. Inutile de vous décrire des centaines d'anecdotes relatives au délabrement du système de santé public, j'en ai trop. Nous sommes descendus dans la rue cet hiver, le gouvernement actuel à envoyé les CRS nous gazer la tronche et nous casser la gueule alors qu'on ne réclamait rien d'autre que pouvoir soigner les gens dignement.
En dix ans, le gouvernement a fait supprimer 70.000 lits d'hospitalisation.
En 2004, la France a instauré un système de rémunération à l'acte appelé T2A (dans le groupe de travail installé à Courchevel pour l'occasion, figurait un certain Emmanuel Macron). La tarification à l'acte place les hôpitaux et cliniques privées en concurrence, les actes rapides (imagerie, chirurgie ambulatoire) rapportant plus que des soins longs non « chiffrables », il devient plus intéressant de prendre en charge de petites pathologies plutôt que des maladies chroniques. Profitant d'investissements privés et de défiscalisations organisées, les cliniques peuvent mettre l'accent sur les soins qui « payent ». Alors que l'hôpital public, lui, doit soigner tous les individus aux pathologies longues et non « rentables » dans le système T2A. De plus, depuis 10 ans, les contraintes budgétaires menées par les différents gouvernements ont imposé 8 milliards d'euros d’économies (ça en fait des masques) à l'hôpital public. Tout semble fait pour détruire l'hôpital pour favoriser les structures privées.
On galère à l’hôpital parce qu'on manque cruellement de tout, des patients meurent faute de lits, aucun moyen n'est investi dans la prévention, dans le suivi à domicile et dans l'accompagnement des plus fragiles. Pas une journée aux urgences sans violences, sans insultes, sans menaces. Je n'en veux pas aux patients agressifs (psychotiques, drogués, marginaux), souvent victimes d'un système social qui les abandonne. Ceux-là ne s'arrêtent pas de souffrir durant le confinement hein.
Je ne vais pas m’étendre sur tout ce qu'on a fait depuis la crise du Covid-19, vous en avez tous eu des images. Je confirme le manque de matériel, l'improvisation et l'amateurisme total de notre gouvernement, ce non-professionalisme étant heureusement sauvé par des médecins, des chefs et des collègues extrêmement efficaces.
En réponse à tout ce que le gouvernement nous fait subir depuis des années et face à leur incompétence qui nous a TOUS mis en danger, ils nous proposent une prime. Une prime. Un chèque plus ou moins élevé selon qu'on ait oui ou non travaillé auprès des malades du coronavirus. Meilleur moyen de nous diviser par ailleurs.
Mais CE N'EST PAS CE QUE NOUS VOULONS !
Nous souhaitons :
— plus de personnel médical et paramédical
— un nombre conséquent de personnels paramédicaux dans les administrations d'hôpitaux et d'agences régionales de santé
— la fin de la tarification à l'acte et de la managérisation de nos hôpitaux comme des start-ups
— la fin de la production des médicaments hors de France. L'ouverture de laboratoires publics à but non lucratif pour produire les médicaments génériques sur notre territoire.
— une revalorisation salariale. Les syndicats réclament 300€ net, avec ça on serait toujours dans la moitié la moins bien payé des pays de l'OCDE. C'est dire si, en effet, comme semble le « découvrir » Mr Macron, nous ne sommes absolument pas payés à la hauteur de notre travail.
— la mise en place de structures de suivi à domicile avec de vrais collaborations pluridisciplinaires afin de désengorger les structures.
— un réinvestissement massif dans le secteur de la recherche à but non lucratif, CNRS entre autres.
— de la vraie nourriture pour les malades et pour nous
—une super machine à café de bâtard, recharge illimitée
À vous qui nous applaudissez à 20h, je vous demande de ne pas vous laisser berner par les faux airs larmoyants de nos dirigeants, par leur fausse empathie et leur hypocrisie manifeste. Posez-vous les bonnes questions, est-ce normal qu'on glorifie les dons privés ? Des repas, c'est le ministère de la Santé qui aurait du penser à nous en apporter. Aucun journaliste n'a critiqué le niveau de cette ligne horizontale que j'ai surligné, or, si nos dirigeants n'avaient pas drastiquement coupé dans le budget de la Santé, cette ligne serait beaucoup plus élevée et nous aurions pu soigner beaucoup plus de malades. Il y a 30 ans en France, on comptait 11 lits de réanimation pour 1.000 habitants, seulement 6 en 2019.... Si les hôpitaux ont tant souffert ce n'est pas la faute d'un pangolin, c'est de la faute des gouvernements. Si autant d'individus sont morts, c'est aussi de leur faute.
À demain, si vous le voulez bien !
bravo à cet infirmier courageux, il a fait le bon résumé de la situation actuelle, ces gens-là vont devoir payer un jour prochain, dans la rue, dans les urnes et devant la justice aussi si possible, le virus a tué, mais eux aussi, responsabilité partagé...
RépondreSupprimerDan