vendredi 10 avril 2020

Virus-Malus-Mortibus, exercice de style, par Maurice Rajsfus (Journal d'un confiné # 22)

Maurice en 2005
Écrivain, journaliste, historien, militant, auteur d’une trentaine de livres sur la déportation et le génocide des juifs, le régime et la police de Vichy, le camp de Drancy, la police française, dont Portrait physique et mental du policier ordinaire, que j’eus le plaisir de publier en 2008, et Je n’aime pas la police de mon pays (Libertalia)Maurice Rajsfus, confiné à Cachan, fêtait aujourd’hui ses 92 ans.
À cette occasion Marc Plocki, son fils, écrit : « Il est né un an juste avant la grande crise de 1929, le fameux Jeudi noir du 24 octobre 1929, à Wall Street, où la légende veut que des investisseurs ou des boursicoteurs ruinés se soient jetés du haut de leur building. Un autre Jeudi noir, celui de la rafle du Vel d’Hiva vraiment vu des désespérés se jeter par la fenêtre de leur logement, à l’arrivée des policiers venus les arrêter au petit matin du 16 juillet 1942. Maurice, qui a été pris dans cette tourmente, en a raconté les détails dans un récit, Jeudi noir, paru en 1988, puis dans une étude historique intitulée Opération Étoile jaune, parue en 2002. »
Ces deux titres ont été repris dans le même ouvrage au cherche-midi éditeur.

Pour fêter ses 92 ans, Maurice nous offre cet exercice de style, qui porte (est-ce un hasard ?) le n°22 de ce journal (en retard d’un jour sur le calendrier confinatoire officiel).


Virus-Malus-Mortibus


En ces temps de lourde contagion
Nous sommes tous des confinés
C’est l’occasion d’exprimer nos fautes

Donc Confiteor
C’est-à-dire, en français vulgaire : je confesse
Ce que l’on confie, en confidence, à un confiné
En qui il nous faut avoir grande confiance.
Cela signifierait-il que nous sommes un certain nombre de confinis ?

Dès lors, est-ce la confirmation que nous serions des congelés ?
Tout en étant en totale confusion.
Dans cette configuration
Réduits à quelques confettis
Nous sommes non seulement tristement déconfis

Sans négliger la nécessaire compassion
Et la complaisance qui nous font grand défaut.
Il ne nous reste alors, pour nous consoler,
Que le confit de canard
Ou la confiture.

Pauvres confinés que nous sommes
Quand donc serons-nous déconfinés
Au risque d’être déconsidérés ?
Des cons, des cons, des conscients de l’être

En toute connaissance de cause.
Vulgum Pecus, nous ne serions donc que les proches parents
Du commun des mortels...

Confinément vôtre
Rajsfus Mauricius, rendu confus par le coronavirus


À demain, si vous le voulez bien  !
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