C’était il y a 9 ans, en décembre 2005. Convoqué par l’ANPE, je
me retrouvai en compagnie de 56 autres chômeurs, contraint de participer à un stage démarrant le
lendemain matin ! M’apprêtant à créer mon entreprise (Après
la Lune), je réussis à échapper à la rafle. Énervé, d’un naturel chatouilleux, je lançai sur le Web un vibrant coup de
gueule, Chômeurs, qu’attendez-vous pour disparaître ? médiatisé par un papier de Christian Losson dans Libération, Canal +, Rebecca Manzoni sur France Inter (Éclectik), bien d’autres d’encore. Ce qui ne sera pas le
cas du superbe livre collectif, Chômeurs,
qu’attendez-vous pour disparaître? paru en 2007, aux éditions Après la Lune, dans une
indifférence quasi-générale, à l’exception de L’Humanité-Dimanche, de Hervé Pauchon sur France Inter, de Rue 89 et de sites militants. Malgré ce silence, le livre eut un certain impact,
grâce, notamment, au soutien de syndicats de chômeurs et de l’ANPE, secouée à l'époque par des grèves, qui
contribuèrent à sa diffusion.
Si je reviens sur cet épisode, qui fut pour moi l’occasion de belles rencontres, c’est parce que neuf ans plus
tard, alors que ma petite entreprise a passé l'arme à gauche, il m’arrive de nouveau quelque chose de très désagréable émanant de Pôle Emploi. Et cette fois, il ne s'agit plus d'un "accident informatique", mais de mots choisis, pesés, par une "conseillère" qui doit ignorer ce que veulent dire les mots "fins de mois", "précarité", "angoisse"…
Chômeur depuis deux ans, j’ai eu affaire à trois conseillers
qui, à défaut de me trouver du travail, furent très attentifs à mes difficultés
pour retrouver un job dans le secteur de l’édition, où mon CV de
franc-tireur ayant appris le métier sur le tas fait hurler de rire. Il y a trois
mois, las d’envoyer des CV à des boîtes qui ne répondent jamais (ou alors "mais vous êtes TROP qualifié"), j’acceptai la
proposition alléchante de mon conseiller de suivre une prestation
intitulée CAP projet (3h par semaine sur 3 mois). Las!
Le quota de chômeurs n’étant pas atteint (il en fallait 6, nous
n’étions que 5 volontaires sur les 8 chômeurs présents), je ne pus suivre cette
prestation, assurée par un prestataire de service de Montreuil, à mon grand regret
car l'animatrice était drôle, sympathique et au demeurant, me sembla-t-il, fort compétente – coucou Léopoldine !
Deux semaines plus tard, mon conseiller me proposa de
suivre la même prestation, cette fois à Saint-Denis. Quelque peu distrait, j’oubliai de me rendre au RV et lui écrivis que je
ne voyais plus trop l’intérêt de suivre cette prestation, étant de surcroît « un peu dépressif ». Re-las ! C'est qu'entretemps, mon référent n’était plus le sympathique Serge A., mais une certaine Peggy W.M., qui avait dû lire les œuvres complètes de Laurent Wauquiez et ne
prêta pas la même oreille compréhensive à mon argument. Et m’écrivit : « Je reçois ce jour votre
courrier m’informant de votre absence à la prestation CAP projet suite à vos
problèmes de dépression. Je vous informe que si vous ne souhaiter [sic] pas
recherchez [sic] d’emploi pour le moment, vous pouvez vous désinscrire de pôle
emploi afin de ne plus être sollicité par nos services. Vous pourrez vous
réinscrire par la suite quand vous aurez retrouvé la motivation pour retrouver
un emploi. »
Autrement dit, à Pôle Emploi, on est cool, on ne vous radie
pas, mais on vous autorise à vous désinscrire (et à cesser de bénéficier de la fastueuse manne RSA-CMU-Transports gratuits). Rompez.
Peggy, vous avez l’air d’être si sensible que je me
demande si, à notre premier rendez-vous (j’en
tremble d’avance), au lieu de vous offrir la brassée de livres que j’ai coutume
d’offrir à mes conseillers Pôle Emploi référents (dont Chomeurs,
qu’attendez-vous pour disparaître ?, qui provoque toujours son petit effet), je ne vais pas vous offrir… un
bouquet de fleurs !