jeudi 14 mai 2020

Aujourd’hui, j’ai dû interdire à des enfants de 4 à 7 ans de jouer au ballon, de s’assoir côte à côte… (Journal déconfiné #60)

Il y a quatre ou cinq mois, un texte (satirique) commençait à me trotter dans le ciboulot. L’homme à la face d’endive mal décongelée qui faisait peur aux enfants raconte l’histoire d’un homme devenu ministre de l’Éducation nationale dans un pays qui ressemble s’y méprendre à la France. Le temps a passé. Le coronavirus est arrivé. La France est devenue la ®ConfinFrance et j’ai décidé de tenir un journal quotidien, repoussant aux calendes grecques (et déconfinées) l’écriture de ce “conte de méfaits”, devenu L’homme à la face d’endive mal décongelée qui faisait peur aux enfants, aux parents, aux enseignants et aux soignants.
En attendant, je partage ce texte d’une institutrice souhaitant conserver l’anonymat.

Personnellement, je serais curieux de connaître l’identité de ces monstrueux (et tout-petits) hauts-fonctionnaires de l’ÉducNat qui ont pondu ces terrifiantes directives (contenues dans l’effarant document de 57 pages envoyé à tout le personnel de l’Éducation Nationale) ? Qui sont ces salopards ? Leur arrive-t-il de dîner en ville avec leurs collègues équarisseurs – les Combrexelle et consorts – des ministères du Travail et de la Santé ? Se concertent-ils ? Ont-ils des enfants ? Ont-ils eux-mêmes été, un jour lointain, des enfants ? Comment peut-on concentrer autant de sadisme, d’inhumanité, de crétinisme ?
Ces photos, piochées sur le Net, n’ont pas été prises dans l’école de l’auteure de la présente tribune.
Témoignage d’une institutrice souhaitant conserver l’anonymat.
Aujourd'hui j'ai dû laisser pleurer un élève de 4 ans jusqu'à ce qu'il arrive à m'écouter l'apaiser car je n'ai pas le droit de mettre une main sur son épaule pour le calmer.
Aujourd'hui j’ai refusé à un élève d'aller aux toilettes durant 5-10 minutes car l'atsem* devait désinfecter tout.
Aujourd'hui j'ai dû interdire à des enfants de 4 à 7 ans de se prendre dans leurs bras, de jouer au ballon, au toboggan, au loup, de s’assoir côte à côte, d’échanger des jouets, d’avoir des vélos en récréation... et j’en passe.

Aujourd’hui j’ai passé plus de temps à interdire, à réguler la circulation, à faire les passages aux toilettes et lavage de mains que de faire des apprentissages.
Aujourd'hui, j’ai vu, malgré nos efforts avec l’atsem, des craintes, des déceptions voire une tristesse dans leurs yeux.
Aujourd'hui, je suis partie de l'école pour la première fois avec honte de ma journée mais en ayant pourtant fait tout ce qu'il “fallait”.
Qu’on ne vienne pas me dire que c'est pour le bien des enfants. Surtout pas. Pas en maternelle. Pas comme ça.

Parents d’élèves de maternelle et de CP : gardez-les si vous le pouvez, pour leur bien !


LIRE : Le 11 mai, ça ne passe pas, M. Blanquer, par Laurine Roux, enseignante


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1 commentaire:

Lili-Vanille a dit…

Heureusement que je suis vieille... Je crois que j'aurais changé de métier !... j'aurais même peut-être fait SDF, ou routarde, ou ermite...?