jeudi 25 juin 2020

Stéphane Espic, l’homme qui murmure à l’oreille des flics du préfet Lallement (Journal déconfiné #68)

S’il n’a pas (pas encore) la notoriété d’un Jérôme Rodriguez, d’un Eric Drouet ou d’une Priscilla Ludowski, Stéphane Espic fait partie des Gilets jaunes que l’hebdo officiel de la macronie paranoïaque Le Point invoque dans ses papiers délirants sur la dangerosité des mouvements d’ultra gauche.
Mis en cause dans de nombreuses affaires, cet homme de 48 ans originaire d’Annecy revendique une bonne douzaine de gardes à vue, pour des faits hauts en couleurs,  réalisés au nez et à la barbe des forces de l’ordre, pratiquant, lors de ses dernières opérations, une technique qui éprouve les nerfs des policiers. Roulant en Vélib’, masqué, ganté, lesté d’une i.phone, d’une faconde et d’un langage aussi fleuri que sa barbe, Stéphane Espic allie l’humour et la provocation, ce qui lui permet de démonter la Trinité absurdité-bêtise-violence des flics au service d’un régime politique qui a basculé dans le régime policier, sous l’impulsion de Castaner et du préfet Lallement.
Ses dernières actions devant l’Élysée me rappelant l’époque héroïque où je me rendais devant le Château, revêtu de l’armure chevaleresque de Fernand Buron [l’ancêtre des Gilets jaunes], afin de souhaiter un mauvais anniversaire à Sarkozy – ce qui me valut une garde à vue hilarante –, l’occasion est belle de lui ouvrir les portes de ce journal déconfiné, ainsi que celles du site du CODEDO (Collectif pour une dépénalisation du délit d’outrage), que je gère (et digère), tant bien que mal, depuis maintenant douze ans, au gré de l’actualité de ce délit inique, qui connaît un regain inquiétant d’activité depuis l'arrivée au pouvoir de Macron et la répression du mouvement des Gilets jaunes, et dont il faut répéter qu’il s'agit, dans 99% des cas, d’un délit d’opinion.

Cette actualité n’a rien à voir avec le procès du 4 septembre.
Mai 2019. Mis en garde à vue pour outrage au chef de l’État, pour avoir adressé un doigt d’honneur à Macron lors d’un hommage aux soldats français tombés au Burkina Faso (affaire classée sans suites), Espic rappelle que dès le 15 janvier 2015, il appelait la population à enfiler un gilet jaune pour manifester.
4 août 2019, anniversaire de l’abolition des privilèges. Il est arrêté pour avoir tagué une palissade de l’Assemblée nationale. Convoqué au commissariat de Versailles pour avoir tagué la permanence d’un député LREM des Yvelines, il se présente avec un homard géant, en hommage au grand nostalgique des privilèges qu’est François de Rugy. Ce qui lui vaudra d’être interdit de séjour à Versailles. Et une ordonnance d’expertise psychiatrique, les magistrats, on le sait, étant cruellement privés du sens de l’humour, lequel est la marque de fabrique des actions de Stéphane Espic, à qui un contrôle judiciaire interdit de « participer à une manifestation qui s’approcherait d’un ministère, du parlement ou d'une permanence parlementaire ».
Évidemment, Stéphane Espic est connu comme le loup blanc à la préfecture de police, ce qui lui apporte une certaine quiétude lors de ses pérégrinations.
Dernière en date : le 21 mai 2020 dans la matinée, il est devant l'Elysée. But de la manœuvre : remettre au président de la République un message d’un groupe d’entrepreneurs et de salariés en difficulté de Belfort. Circulant en Vélib’, reconnaissable à son béret noir et à sa faconde, Espic, il se fait interpeller par des policiers. La scène, filmée par Philippe Bouriachi, pour le Grand forum, est visible ci-dessous. Elle dure plus de 20 minutes et c’est un peu le désert des Tartares (à 6’40”, Espic sort un gant retourné de sa poche, ce qui lui vaudra d’être poursuivi pour outrage, les policiers l’accusant d’avoir volontairement positionné les doigts du gant dans le but de leur adresser un doigt d’honneur !)
Arrêté pour délit d’outrage, Stéphane Espic comparaîtra le 4 septembre 2020 à 9 h, devant la 29e chambre du TGI de Paris. Il est poursuivi pour trois outrages et pour avoir effectué à treize reprises des dégradations de biens, par inscription, signe ou dessin, dont on trouvera la liste dans l’ordonnance de placement sous contrôle judiciaire du juge des libertés et de la détention, le très “droitier” Charles Prats, dont il était fait état ici, à l'époque où il s’acharnait sur le militant Antonin Bernanos.



Dans son dernier “live”, il présente la manifestation nocturne du 24 juin devant la Maison de la Radio, où des flics jettent leurs menottes par terre et s’auto-applaudissent en chantant La Marseillaise, en soutien à leur confrère de Strasbourg condamné à 18 mois de prison avec sursis pour avoir sauvagement matraqué une dame Gilet jaune de 62 ans.

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