vendredi 31 janvier 2020

“First love, le dernier yakuza" de Takashi Miike, un cocktail réjouissant de démesure, de violence et d’humour

Takashi Miike a réalisé 59 films depuis 1991, parmi lesquels le très perturbant Audition et sa vengeance par acupuncture, qui conduisit la petite nature que je suis aux urgences de l’Hôtel-Dieu, suite à un malaise vagal, un matin de 2002. Comme je ne suis pas rancunier, je suis allé voir son dernier film, et je n’ai pas regretté. Miike assume son œuvre d’histrion. Il s’amuse et tire dans tous les sens, avec ce cocktail survitaminé. Démesure, cruauté, violence poussée à son paroxysme, humour grinçant communicatif, autant par la cocasserie hilarante des situations que par les dialogues épatants.
Ma chronique sur ce film réjouissant dans Double Marge.

Et aussi une critique comparée avec le film de Diao Yinan, Le Lac aux oies sauvages, qui m’a profondément ennuyé et déplu.

”Le lac aux oies sauvages”, de Diao Yinan, quand la surenchère de virtuosité et d’esthétisme confine à l’indigence

Applaudi à tout rompre et à Cannes par Tarantino, ce qui n’est pas forcément bon signe, et en tout cas pas un gage de qualité, Le Lac aux oies sauvages, du Chinois Diao Yinan, a enchanté une critique en génuflexion, à l’exception notable de Libérationqui sauve l’honneur et évoque les « néons et néant » d’un « produit flashy et artificiel », « édifié comme une avalanche de prouesses flagrantes d’une bêtise sans nom ».
Ma chronique sur ce film tape-à-l’œil, ennuyeux, fort indigeste sur Double Marge.

Je propose aussi une critique comparée avec le fort réjouissant film de Takashi Miike, “First love, le dernier yakuza”.

mardi 21 janvier 2020

Emmanuel Macron bunkérisé à l’Élysée : c’est pour bientôt !

Les pirouettes de l’Histoire sont parfois délicieusement féroces !
Emmanuel Macron, qui n’était encore que fondé de pouvoir de la banque Rothschild à l’époque (2010) où parut “Je suis partout (les derniers jours de Nicolas Sarkozy”, serait en passe de subir le même sort que Sarkozy dans cette politique-friction narrant la bunkerisation d’un président devenu imprésentable !

samedi 11 janvier 2020

[Expérience-limite.] Crier « Macron démission » sur un quai de métro bondé pendant la grève de la RATP

Ayant atteint un âge (61 balais et quelques joncs) où beaucoup, le corps moulu, meurtri par des années de labeur à marche forcée, prennent une retraite bien méritée ; réalisant avec stupeur que je ne gagnerais plus jamais ma vie avec mes romans (dont le dernier n’a pas été diffusé en librairie), j’ai décidé, malgré mon âge grandissant, de trouver un travail, ni trop pénible, ni trop désespérant, tel cet emploi de scribe qui me fit rencontrer [lire De l’estime de soi] des gens aussi charitables et sympathiques que Jean-Denis Combrexelle, l’un des architectes décomplexés de la loi El Khomri, dont la contestation populaire marqua l’entrée dans l’ère de la répression policière instituée par François II le Poltron, atteignant la sinistre apothéose que l’on sait sous la présidence de Macron.
Ce riant négociateur qui négligea de serrer la main du scribe que j'étais
Les derniers boulots proposés par Pôle Emploi [on lira ici mon ultime expérience-limite avec l’institution], conducteur de locomotive, croupier – je n’invente rien – ne valant pas tripette, je me résignai donc à utiliser la technique préconisée par celui qui, fruit d’un hold-up aussi génial qu’ingénieux, s’empara des clefs de l’Élysée : j’ai traversé la rue, après avoir bien regardé à droite puis à gauche pour ne pas me faire écraser par un robocop énucléateur du consortium ®Castagner-Lallement-Strodza qui ont fait des rues de Paris, de Nantes et de Navarre une préfiguration de l’État policier qu’est devenu notre pays.
Et j’ai trouvé !
J’ai trouvé un travail, salarié, cotisations sociales, collègues de travail, contrat de travail (CDI, s’il vous plaît !), congés payés, tout le toutim. Ce qui ne m’était pas arrivé depuis… bien longtemps.
– Et que fais-tu, mon ami ?
– Je veille sur le repos des âmes en peine.
– Gardien de cimetière ?
– Mon allergie aux squelettes ne le supporterait pas.
– Catacombes ?
– Vous avez l’esprit d’escalier…
– Gardien de phare ?
– Nonobstant le grand réchauffement, la mer ne monte pas encore jusqu’à Paris, allons !
– Hôpital psychiatrique ?
– Sainte-Anne du Bon-Secours n’a pas besoin du mien.
– Centrale nucléaire ?
– La compagnie Alligator 327 refroidit les petits poissons de la Seine loin de Paris.
– Greffier de ministère ?
– J’ai déjà donné, merci bien !
– Psychologue en cellule de soutien de l’ÉducNat ?
– Je ne mange pas de ce Blanquer-là.
– Gardien de scène de crime pour la police scientifique ?
– Trop bigleux.
– Je donne ma langue au chat !
– La nuit, tous les chats sont gris, vous brûlez.
– Veilleur de nuit !
– Saperlipopette ! Vous avez mis le temps !
Ainsi donc, après de longues errances insomniaques, j’exerce depuis peu l’étrange profession de veilleur de nuit. L’endroit étant catalogué « sensible », je ne dévoilerai pas dans quelles antres de Paris j’exerce mon vigilat nocturne. Ce n’est d’ailleurs pas l’objet de ce billet. Enfin, pas tout à fait, car l’anecdote que je vais vous narrer ne se serait sans doute pas produite si j’avais pris le métro de bon matin pour aller au travail, piquant du nez dans une phase de sommeil résiduel.
9 décembre 2019, 8h et des poussières. Je quitte mon boulot, quelque part dans le sud de Paris. Les accordéonbus de la ligne 62 étant pris d’assaut par des grappes de zombis affamés, je m’élance sur le bitume sous une pluie battante. Vingt-cinq minutes plus tard, trempé comme un petit Lu nantais soumis aux tirs nourris des flics du préfet d’Harcourt, me voilà dans la ligne 4 du métro, épargnée par la grève, direction Porte de Clignancourt. Silencieuse et connectée, la foule s’épaissit, jusqu’à ce que la voix du conducteur vienne casser l’ambiance. 
« Suite à un incident technique, la circulation est interrompue entre Saint-Germain-des-Prés et Château d’Eau. »
Des rires fusent. Les doigts pianotent sur les écrans digitaux. Une idée saugrenue me traverse l’esprit. Je mets mes mains en porte-voix. « Mesdames et Messieurs… » Et puis non, je ne fais rien.  Pas encore. La nouvelle est confirmée trois stations plus tard. « Saint-Germain-des-Prés. Terminus, tout le monde descend. »
Se retrouvent sur le quai environ 373 voyageurs, qui progressent à pas de tortue vers la sortie à la vitesse de 0,0008 km/h, vite rejoints par 298 autres déboulés d’un second train arrivé deux minutes plus tard. De cette foule d’usagers fantomatiques émergent çà et là des bras levés, qui immortalisent le moment.
Ce que je me résous à faire ; la preuve :
Et c’est alors que je me décide à lâcher l’incantation qui me trottait dans la tête.
« Mesdames et messieurs, je vous propose de reprendre avec moi un petit slogan qui nous mettra un peu de cœur à l’ouvrage ! » Mains en porte-voix, je gueule : « MACRON-DÉMISSION ! MACRON-DÉMISSION ! » Deux ou trois personnes esquissent un sourire, mais personne ne reprend. C’est sur ma droite que tombe la première semonce. Un type, trente ans, baby-boomer de la start-up generation, écouteurs coûteux aux oreilles, dans la main le smartphone dernier cri qui doit lui tenir lieu d’oreiller. L’homme goûte peu mon humour déplacé, me fusille du regard.
– Vous vous trouvez drôle ?
– C’est quand même à cause de lui qu’on est tassés comme ça, non ?
– Pauvre type !
– Vous aimez Macron ? Je vous plains…
Le mec étant prêt à me casser la figure, je n’insiste pas. Sur ma gauche, un quadragénaire barbichu binoclard, triste comme un jour sans train, me toise, à peine plus aimable.
– Vous croyez que ce serait mieux avec Mélenchon ?
– J’ai parlé de Mélenchon ?
– Non, mais…
– Je suis anarchiste et je ne vote pas. Et moi non plus, ça ne m’amuse pas d’être là…
La suite de ce court dialogue se perd dans la marée humaine qui mettra de longues minutes à s’extraire de la station de métro.
Dehors, j’en rigole encore. La pluie a cessé. Deux copines, la vingtaine, m’alpaguent sous un abribus. « Eh ben, vous avez l’air joyeux ! » Je réponds que oui, je raconte l’anecdote, mains en porte-voix, devant dix passants médusés. « MACRON, DÉMISSION ! » Les jeunes rigolent, ça fait plaisir. Après avoir distribué quelques conseils de navigation à deux dames naufragées de la RATP, je m’engouffre dans un 96 qui file vers Bastille, en chantonnant le tube des Gilets jaunes : « On est là… On est là… Même si Macron ne veut pas, nous on est là ! Pour l’honneur des travailleurs, et pour un monde meilleur, même si Macron ne veut pas, on est là… »

Là, j’y suis encore, au moment où j’écris ces lignes, un mois plus tard jour pour jour. Dans un autre métro, un autre bus, une autre rue, dans cet espèce de cocon froid où les visages fatigués restent disponibles pour une conversation aimable dont l’état de grève fait ressortir l’impérieuse nécessité, faisant mentir le dicton stupide : « Parisien, tête de chien ! »
, nous sommes toujours, peut-être pour longtemps encore. Dans la rue  où il est de plus en plus difficile de manifester sans se faire casser la gueule par les chiens de garde du consortium ®Castagner-Lallement-Strodza, gardant malgré tout l’espoir de faire battre en retraite Macron Ier, ses obligés et ses affidés, que j’appelle, dans un conte que vous pourrez lire ici, les soudards de la raie-publique !

samedi 4 janvier 2020

“Péter les boulons”, de Laurence Biberfeld, le roman (jouissif) qui vous venge de Macron et de ses sinistres affidés

Dans la vraie vie, les « pauvres gens », rebaptisés « pov’cons » par Sarkozy, « sans-dents » par Hollande et « gens qui ne sont rien » par Macron, croulant sous des bérézinas de dettes, d’injustice, de malveillance, de misère, finissent souvent par se décourager, voire de s’effondrer dans des marasmes sans fond. Désespoir, alcoolisme, solitude, dépression, clochardisation, etc. Ces gens, que l’on a appelés « invisibles » quand ils ont cessé de l’être, en enfilant des gilets jaunes, en occupant les ronds-points des campagnes puis les rues des villes, parfois, se révoltent, faisant du jaune, couleur du traître-ouvrier, celle de la dignité, de la solidarité, de la révolte. Avant d’être recouverts de rouge, ensanglantés par les milices d’État d’un pouvoir fascisant aux abois…
Ma chronique du dernier roman de Laurence Biberfeld est sur Double Marge, le magazine des littératures et des arts, qui consacre ce mois-ci un dossier à Laurence Biberfeld, réalisé sous la houlette catalane de Kits Hilaire.
Entre les machines à broyer du capitalisme et les êtres promis à la casse se dresse Laurence Biberfeld.

Péter les boulons, de Laurence Biberfeld, Éditions in8, 264 pages, 17 €

“La Vie invisible d’Eurídice Gusmão”, un film (magnifique) de Karim Aïnouz

Il y a des films qui s’installent tranquillement, laissant à votre cerveau le temps de s’accomoder. Et il y a ceux qui vous accrochent dès le premier plan. C’est le cas de La Vie invisible d’Eurídice Gusmão, septième film de Karim Aïnouz, récompensé à Cannes par le prix Un certain regard, adaptation on ne peut plus libre d’un roman de Martha Batalha traduit en français en 2017 sous le titre Les mille talents d’Eurídice Gusmão. Dès l’entrée en matière, les deux sœurs, Euridice et Guida, crèvent l’écran. Le film vous emporte tel un torrent, pas le temps de respirer…
La suite de cette critique sur Double Marge, le webmagazine des littératures et des arts, où je tiens une rubrique cinocheuse (et parfois littéraire) mensuelle.