mardi 16 septembre 2014

Le moment et la manière, un film de Anne Kunvari sur la fin de vie de Anne Matalon. En salles le 22 octobre.


Il y a deux ans, Anne Matalon, dont j’eus le bonheur de publier deux romans aux éditions Baleine, nous quittait, après avoir lutté pendant quatorze ans contre le cancer. La documentariste Anne Kunvari l’a filmée durant les trois derniers mois de sa vie. Malgré le refus des chaînes de télévision publiques de coproduire le film, Le moment et la manière, produit par Viviane Aquili et Iskra productions, sort en salles le 22 octobre 2014. Anne souhaitait choisir le moment et la manière de mourir : cela ne lui fut pas possible. Le film sera préalablement présenté aux parlementaires lors d’une projection au Sénat, en présence de Didier Sicard, auteur du rapport sur les modalités d’assistance aux personnes en fin de vie, et Jean Leonetti, dont la loi du 22 avril 2005 relatifs aux droits des malades et à la fin de vie porte le nom. Plus de détails sur le site du film.
Vous pouvez participer à son financement en souscrivant sur le site touscoprod.com

Critique du film sur le site OURS ROUGE et sur le site du cinéma UTOPIA de St-Ouen-l'Aumône (débat le 23 octobre en présence de Anne Kunvari).

vendredi 5 septembre 2014

La "causerie à thème aléatoire" : un nouveau concept littéraire, ludique et révolutionnaire

Invité par Nyota Mollin à animer un débat au festival Tribus Polar de Fouras les 6/7 septembre, j’ai sélectionné quatre thèmes qui n’ont, à ma connaissance, jamais été évoqués dans les festivals, en tout cas dans ceux que je fréquente depuis 1992. Plutôt que de choisir arbitrairement l’un des quatre sujets, j’ai décidé, pour pimenter l'affaire, de procéder au choix du sujet par tirage au sort, en créant un nouveau concept : la causerie à thème aléatoire. Ni les invités (Sylvie Cohen, Michel Chevron, Nicolas Jaillet), ni le "causeur" ne sauront de quoi ils parleront avant le début de la causerie. Voici les 4 thèmes choisis.
1. L’ART ET LE GÉNIE DU CRIME.
Cet intitulé pourra paraître déplacé en ces temps de barbarie (Syrie, Djihadistan, Gaza, Nigéria), mais il s’agit de second degré et nous sommes bien dans la fiction. Ce thème m’a été inspiré par mon maître, le génial Pierre Siniac, décédé en 2002, qui écuma avec brio la thématique, notamment dans une de ses plus brillantes nouvelles, Situation : critique (dans Folies d’infâmes), dans laquelle des assassins imaginatifs convient des critiques patentés à assister à leurs crimes, avant d’être notés comme au patinage artistique. Pas question donc, de faire l’apologie des docteurs Petiot, Landru, Garreta et autres Cahuzac, mais tout simplement de poser certaines questions élémentaires, curieusement ignorées des festivals. « Le criminel, artiste ou artisan ? La fascination pour les tueurs en série est-elle le fruit d’une frustration artistique morbide ? Génie criminel, gêne criminel, comment s’y retrouver ? Les auteurs de polar tuent-ils dans la fiction pour éviter le passage à l’acte dans la vraie vie ? "Je tue, donc je crée" : un cogito au-delà des tabous ? »
Pierre Siniac
2. POUR EN FINIR AVEC LA LITTÉRATURE POLICIÈRE.
Il ne s’agit pas de brûler le roman policier mais de s’interroger sur la juxtaposition malheureuse de deux mots aussi antinomiques que le substantif littérature et l’adjectif policière. Dans la réalité comme dans la fiction, pour faire un bon fait divers, et donc une bonne intrigue, il faut 1°) une victime ; 2°) un coupable ; 3°) un enquêteur. Parce que l’appellation « roman policier » colle bien à l’idée de procédure policière, le vocable policier l’a emporté sur les autres, par commodité. Ce qui paraît vraiment aberrant, d’un point de vue éthique, et j’ose le dire, esthétique, c’est de laisser entendre que la littérature puisse être policière, alors qu’elle représente par essence la liberté. Aucune littérature, à part peut-être un procès-verbal d’interrogatoire ou une lettre de délation, ne peut être considérée comme policière. Ce n’est tout simplement pas possible car cela voudrait dire que les auteurs de polar se trouvent forcément du côté de l’ordre, c’est-à-dire du pouvoir, car dans nos sociétés, la police ne sert pas seulement, hélas, à confondre les assassins et à défendre la veuve et l’orphelin, comme on nous le fait croire aimablement à longueur de séries télévisées. Elle sert aussi, accessoirement, à crever les yeux de manifestants pacifiques, comme on l’a vu récemment à Nantes lors de la dernière manifestation contre l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes…
À ceux qui penseraient que ce thème est une vieille rengaine anarchiste, je rappelle que chez nos voisins, le polar s’appelle giallo (jaune) en Italie, negra (noir) en Espagne, detective novel en Angleterre, krimi (crime) en Allemagne, kriminalov (littérature criminelle) dans les pays de l’Est, roman de gendarmerie chez nos amis belges, qui, eux, n’ont pas oublié que les gendarmes sont de tout aussi bons enquêteurs que les policiers.
3. POLAR ET PHYSIQUE QUANTIQUE.
Qu’a donc à voir la physique quantique avec le polar ? direz-vous. Deux réponses possibles : TOUT. RIEN. (Ne faisons pas les choses à moitié.) Et deux réponses valables. Car s’il est vrai que la physique quantique, qui s’intéresse à l’infiniment petit, n’a rien à voir avec l'univers macroscopique romanesque, il est tout aussi vrai que c’est grâce à un principe quantique, appelé « brisure de symétrie », que l’Univers a pu se développer au moment du Big Bang, grâce à l’interaction du fameux boson de Higgs, et s’il n’y avait pas eu cette fichue brisure de symétrie qui a permis à la matière de prendre l’ascendant sur l’antimatière, l’Univers n’aura pas connu la fantastique expansion qui fut la sienne, et cette causerie autour du polar, comme tout le reste, n’aurait pas lieu. Plus sérieusement… Il y a une seconde raison à répondre OUI. Certains principes quantiques sont utilisés dans les polars, et dans toute littérature qui procède d’une dynamique du récit, à commencer par les fameux états superposés, qui veulent qu’une particule peut très bien se trouver à deux endroits en même temps, ou cet autre principe qui veut qu’une particule peut très bien, pour aller d’un point à un autre, utiliser tous les chemins possibles, ou encore le fameux principe d’incertitude (Heisenberg), qui énonce qu’il est impossible de connaître à la fois la position et la vitesse d’une particule. Beaucoup de ces principes sont utilisés par les auteurs dans la construction de leur intrigue. Dans les polars, l’ubiquité est reine, le soupçon est partout, la statistique et la paranoïa prospèrent, et il y a toujours un particulier qui se la joue particule essayant d’échapper à la vigilance des gardiens de l’ordre moral et aux lois de l’entropie. Et qu’est-ce qu’un roman, sinon une grande équation, avec des inconnues, des intégrales, et, parfois même, des conjectures ! Donc, pour conclure, le polar et la physique quantique, c’est exactement la même chose : un sacré foutoir !!!
4. LES ATTRIBUTS DU POLAR.
Ce thème, très équivoque, se décline en trois parties. Un. « Pour vous, quels sont les attributs du polar ? » (Le polar, c’est quoi ? Quel est sa fonction morale (s’il en a une) ? Qu’est-ce qu’il le différencie de « l’autre littérature » ?)
Deux. « Quel tribut (au sens de contribution) avez-vous personnellement apporté au polar ? Est-ce que, pour vous, écrire un polar était une évidence, une nécessité, ou êtes-vous arrivé un peu par hasard dans le « mauvais genre » ? »
Trois. « De quelle tribu polar vous sentez-vous proche ? Quelles sont vos influences ? Vos connivences ? »